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Quand tout le monde parle d’écologie, faut-il s’en inquiéter ?

Face à cette situation, les Verts ont deux réactions : on nous pique notre fonds de commerce ou il n’y a que les Verts qui en parlent bien.

Ces deux réactions me semblent absurdes. En effet, il est positif qu’enfin toutes les forces politiques et les acteurs économiques se préoccupent des conséquences des activités humaines sur la planète. Il n’est même que trop temps qu’ils prennent enfin conscience de la situation. Il faut dire qu’autant il est facile de ne pas voir un moineau, autant quand un paon fait la roue devant vous il est difficile de l’ignorer. Or aujourd’hui, impossible d’ignorer les dérèglements climatiques, même s’il reste quelques irréductibles pour le nier ou pour exonérer les humains de leur responsabilité, et malheureusement la situation est même pire que ce qu’avait pu envisager scientifiques et écologiques. Les phénomènes sont beaucoup plus rapides qu’imaginés et régulièrement l’affinement des analyses démontrent que la situation est encore plus grave que prévue.
Impossible de ne pas voir la réduction accélérée de biodiversité et la raréfaction de certaines ressources comme le pétrole, certains métaux, le poisson, etc.
La crise écologique est là et bien là. Et en tant qu’écologiste on ne peut que se féliciter de la prise de conscience de sa réalité, y compris donc par l’ensemble des partis politiques et par les acteurs économiques.

Mais ceux qui viennent d’en prendre conscience se limiterait à des discours. Pas tout à fait car l’urgence oblige maintenant à agir. Il y a donc des initiatives un peu partout.

Le débat ne porte donc plus sur la reconnaissance de la crise mais sur le type de réponses à la crise. C’est une avancée extrêmement intéressante.

On peut effectivement comme le fait le PS en ce moment introduire l’écologie dans sa nouvelle déclaration de principes, tout en continuant à en appeler à une croissance forte au niveau européen et exiger pendant des semaines le retour à la TIPP flottante pour contrer la hausse du prix des carburants automobiles, ce qui est une réponse absurde car repoussant la recherche de solutions à un plus tard sans horizon.

On peut aussi comme le fait le gouvernement UMP clamer qu’il faut prendre en compte les réserves limitées du pétrole et en tirer comme conclusions qu’il faut relancer le nucléaire et les agrocarburants.

Plusieurs types de réponses peuvent donc être apportées mais les divergences ne recoupent pas d’un côté écologistes au long cours et de l’autre convertis récents. Elles séparent ceux qui veulent aménager le capitalisme en « capitalisme vert » et ceux qui veulent changer totalement le modèle de production et de consommation. Cette différence dans la façon de répondre à la crise traverse aussi les Verts.

Le capitalisme dans sa phase actuelle est en crise et comme à chaque crise il cherche un nouveau souffle. Certaines fois c’est la guerre (1ère guerre mondiale) ou la guerre lui offre un nouveau rebonds (2ème guerre mondiale), d’autre fois ce sont des découvertes qui permettent un nouvel essor (moteur à explosion, informatique …).

Cette fois-ci nous entrons donc dans l’ère du capitalisme vert qui va donner un nouveau souffle au capitalisme jusqu’à la prochaine crise. Le capitalisme vert consiste à prendre en compte des paramètres environnementaux sans remettre en cause la philosophie profonde du système. Ainsi Mac Donald’s peut trier ses déchets, convertir ses bâtiments aux normes environnementales et énergétiques, cela ne l’empêche pas de faire de la mauvaise bouffe et d’exploiter ses salariés. Ceux qui sont pour le capitalisme vert vont se féliciter de l’évolution de Mac Donald’s et ses semblables. Ceux qui sont pour une société de la sobriété qui en même temps qu’elle cherche à réduire la ponction sur les ressources de la planète, veut conjuguer alimentation et santé et justice sociale sont pour la disparition de Mac Donald’s.

D’autres analyses font reposer la solution de la crise écologique sur la suppression de la course au profit. Malheureusement ce n’est pas si simple. Les pays européens ayant le plus dégradé leur environnement sont les anciens pays du bloc soviétique dont le moteur économique n’était pourtant pas la course au profit. Et admettons-même que la situation soit différente aujourd’hui avec la prise de conscience environnementale, cela ne suffirait quand même pas.

Pour d’autres, il suffirait de répartir autrement les richesses de la planète en réduisant la consommation des plus riches pour résoudre la crise. Hélas non, il est trop tard, nous consommons aujourd’hui au niveau mondial, l’équivalent de deux planètes. Même en ne réduisant que la consommation des plus riches de chaque pays, le compte n’y est pas. Rien qu’en France, nous consommons globalement l’équivalent de quatre planètes.

Il n’y a donc pas d’autre choix que de réduire drastiquement la consommation. Cela implique des changements individuels et des politiques globales car il n’est pas question que cela se traduise par la paupérisation de la majorité de la population pendant que d’une petite minorité continuera à se goberger.

C’est possible sans pour autant sombrer dans le dénuement car notre mode de production et de consommation est synonyme de gaspillages. Par exemple :
Réorienter la production vers la relocalisation des productions signifie déjà moins de consommation de transports bouffeurs d’énergie d’un côté et de l’autre relocalisation d’emplois.
réorienter la production vers des produits durables et réparables signifie moins de consommation de matières premières de toute sorte, donc moins de consommation d’énergie pour la production et pour la destruction ou le recyclage. C’est aussi un gain de pouvoir d’achat.
Réorienter la production vers des produits utiles c’est ne pas produire des dizaines de modèles similaires et inutiles, c’est par conséquent supprimer quasiment la publicité commerciale (et ses tonnes de prospectus papier) qui n’a plus de raisons d’exister dans ce cas.
Respecter les saisons pour la consommation de produits alimentaires, cela veut dire moins de transports, moins de produits chimiques de toute sorte pour leur conservation pour plus de saveur et de valeur nutritive à l’arrivée. De ce point de vue consommer bio si c’est pour tout importer de l’autre bout de la planète a certes des avantages en terme de santé pour ceux qui ont les moyens de les acheter mais se révèlent un vrai désastre pour le bilan environnemental global.
Etc.

Il faut donc partir des besoins de ceux qui ont le moins pour construire un modèle de consommation supportable pour la planète. Mais autant il ne suffit pas de supprimer les profits pour que le modèle soit supportable pour la planète, autant il n’est pas possible non plus de confier au marché le soin d’atteindre un tel objectif. Il faut réintroduire la planification pour faire les choix nécessaires en terme de production, d’aménagement du territoire, d’agriculture, de répartitions des richesses.

Il est de la responsabilité d’une alternative à gauche de construire un tel programme pour éviter que le dilemme « écologie ou barbarie » ne soit tranché en faveur du deuxième terme par le choix du capitalisme vert qui représente un mirage facile mais dangereux car incapable de résoudre la crise écologique bien qu’en faisant payer les principaux coûts aux couches populaires de tous les pays. Le débat n’est donc plus entre écologistes et non écologistes, le débat porte sur la décroissance de l’empreinte écologique, la justice sociale et le rejet du libéralisme, sur capitalisme vert ou écologie solidaire.

Martine Billard
 

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